Magnifique Gui

Je raffole de ce calligramme insolent, viril et magique de la cravate vu par Guillaume Apollinaire (Calligrammes,1918), je devrais, que dis-je on devrait, la Bnf par exemple, vendre ce calligramme imprimé dans l'unique but de pouvoir s'affirmer comme dandy surréaliste et…insolent, encore une fois.

Je me suis aperçu qu'il n'y avait pas que des calligrammes ( mot créé par Apollinaire lui-même) dans le recueil éponyme et qu'il y en avait même dans d'autres de ses recueils, notamment
les merveilleux Poèmes à Lou que j'ai acheté dans la même fameuse "collection blanche", c'est-à-dire pour les laïques la collection de poche nrf.

Il ya ce calligramme superbe offert à Louise de Coligny-Châtillon, surnommée Lou. Je ne peux que le transcrire, la qualité de l'impression nuisant la lecture du calligramme :

"La mielleuse figue octobrine seule a la douceur de vos lèvres
qui ressemblent à sa blessure lorsque le fruit trop mûr le noble fruit que je voudrais tant cueillir hâtait sur le point de choir ô figue désirée bouche que je veux cueillir blessure dont je veux mourir."

Le calligramme a bien sur la silhouette d'une figue.

Dans ce même recueil il y a le sublime bien que classique septième poème :

"Mon Lou la nuit descend tu es à moi je t'aime
Les cyprès ont noirci le ciel a fait de même
Les trompettes chantaient ta beauté mon bonheur
De t'aimer pour toujours ton cœur près de mon cœur
Je suis revenu doucement à la caserne
Les écuries sentaient bon la luzerne
Les croupe des chevaux évoquaient ta force et ta grâce
D'alezane dorée ô ma belle jument de race
La tour Magne tournait sur sa colline laurée
Et dansait lentement lentement s'obombrait
Tandis que des amants descendaient de la colline
La tour dansait lentement comme une sarrasine
Le vent souffle pourtant il ne fait pas du tout froid
Je te verrai dans deux jours et suis heureux comme un roi
Et j'aime de t'y aimer cette Nîmes la Romaine
Où les soldats français remplacent l'armée prétorienne
Beaucoup de vieux soldats qu'on n'a pus habiller
Ils vont comme des bœufs tanguent comme des mariniers
Je pense à tes cheveux qui sont mon or ma gloire
Ils sont toute ma lumière dans la nuit noire
Et tes yeux sont les fenêtres d'où je veux regarder
La vie et ses bonheurs la mort qui vient aider
Les soldats las les femmes tristes et les enfants malades
Des soldats mangent près d'ici de l'ail dans la salade
L'un a une chemise quadrillée de bleu comme une carte
Je t'adore mon Lou et sans te voir je te regarde
Ça sent l'ail et le vin et aussi l'iodoforme
Je t'adore mon Lou embrasse-moi avant que je ne dorme
Le ciel est plein d'étoiles qui sont les soldats
Morts ils bivouaquent là-haut comme ils bivouaquaient là-bas
Et j'irai conducteur un jour lointain t'y conduire
Lou que de jours de bonheur avant que ce jour ne vienne luire
Aime-moi mon Lou je t'adore Bonsoir
Je t'adore je t'aime adieu mon Lou ma gloire"